Quand Tuuli va prendre un café et faire peur aux gosses • Waverly
Tu sais que j'ai été une enfant.
Tuuli est stressée. Et ça ne lui arrive jamais. Ou presque. Elle est invitée à prendre un café, chez une femme qui a fait partie de son passé. Waverly. Elle est gentille, elle est aimable, souriante, bienveillante. Elle représente la mère parfaite. Mais Tuuli, elle, elle a horreur de ça, ça l'irrite, la contrarie. Elle y va par respect pour cette femme blessée, pour son ancien tuteur, aujourd'hui décédé et pour ne pas faire l’asociale encore une fois. Elle a déjà décliné deux fois cette invitation mais aujourd'hui, elle est en permission, elle n'a pas d'excuse alors elle prend la navette et y va.
Elle se retrouve devant la porte, le visage dur et figé. Elle sent déjà qu'elle va s'agacer, s'énerver, elle entend déjà les gosses que Wave garde. Ils ont peur d'elle... Et ça, ça lui arrache quand même un léger sourire. Des gens passent derrière elle. Un soupir. Elle sonne...
Quand Tuuli va prendre un café et faire peur aux gosses • Waverly
Tuuli Koskinen était tout un phénomène. Petite, une vraie princesse aux joues toutes rondes. Adulte, la scientifique la plus rigide de toute la base. Perfection, perfection, perfection. Elle n’avait que ce mot à la bouche. Mot que le petit Jadran ne savait même pas prononcer ! D’ailleurs, où était-il ? Waverly fit un tour de fauteuil, roula vers la chambre des enfants pour les voir accroupis devant une piste de course. Les deux jeunes garçons faisaient des bruits de bouche, imitant le moteur de leurs voitures miniatures. La tutrice sourit, soulagée de constater que Jadran et Njall n’étaient pas en train de se taper sur la tête. En tant que petits garçons, ça aurait été normal mais parfois, on pouvait presque croire que c’était sérieux, que les deux enfants entraient dans une compétition mondiale de Qui est le meilleur ?.
Ce fut Midas, beaucoup plus calme que les deux autres, qui ouvrit à la porte. Ses yeux clairs se levèrent vers Tuuli. Il détourna la tête en directement du salon et leva la voix :
« Waverly ! Il y a une dame pour toi ! - Fais-la entrer, j’arrive ! »
La quarantenaire manœuvra son fauteuil jusqu’à l’entrée et son sourire s’élargit en voyant qui se tenait devant la porte. Elle fit un grand signe de main à la scientifique, l’invitant à la rentrer.
« Bonjour Tuuli ! Viens par-là, n’hésite pas. Tu aimerais quelque chose à boire, un thé, un café ? »
Midas, ayant accompli sa tâche, retourna s’asseoir dans la cuisine, grignotant un biscuit, sirotant un verre de lait et, surtout, à fond dans ses devoirs. Waverly désigna à Tuuli une place libre et roula jusqu’aux comptoirs. Plus loin dans la maison, des cris s’élevèrent. Ils étaient beaucoup moins enjoués que les bruits de Nascar que la tutrice entendait plus tôt. L’instant d’après, le petit Jadran avait surgi dans la cuisine, cheveux défaits et yeux plein d’eau, peu après suivi de Njall, dans le même état mais sans les larmes.
« Waverlyyy ! Njall méchant ‘vec moooi ! - C’est lui qui a commencé ! - Neeee, pas vrai ! - Oui c’est vrai ! »
Waverly pinça l’arrête de son nez et se tourna face aux garçons. Elle eut un geste d’excuse envers Tuuli et, se penchant à la hauteur des deux petits fautifs, elle agita les mains pour attirer leur attention. Cela prit un moment, d’ailleurs, Njall et Jadran étaient repartis dans leur confrontation.
« Focus, les garçons, fo-cus ! Que c’est-il passé ? - Njall a pris ma voiture ! - Il a triché ! - Toi aussi ! - Non ! »
Les échanges tumultueux entre les deux enfants durèrent quelques courtes minutes. Heureusement, Waverly sut habillement les calmer et les renvoya dans leur chambre, continuer leur jeu de course. Légère, elle revint vers Tuuli, s’excusant platement.
« Donc, tu m’avais dit… Du thé ? Au fait, comment te portes-tu ? »
Quand Tuuli va prendre un café et faire peur aux gosses • Waverly
Mais c'était il y a longtemps.
Tuuli laissa échapper une expression de surprise en se retrouvant face à un enfant. Elle déglutit, se sentant observer sous toutes les coutures. Les enfants, ça n'avait jamais été son fort. Elle se tenait à distance des mômes et les mômes avaient tendance à l'éviter aussi. Un accord tacite en quelque sorte. Tuuli ne s'imaginait jamais être mère. Elle n'avait même jamais effleurer l'idée d'un quelconque mari ou mariage ... Elle déglutit une nouvelle fois.
« Waverly ! Il y a une dame pour toi ! - Fais-la entrer, j’arrive ! »
Mine de rien, elle fut soulagée en voyant l'enfant s'éloigner d'elle. Elle entra poliment dans la maison, son visage toujours aussi neutre. À vrai dire, elle ne savait même pas elle-même si elle était contente ou non d'être là. Tout lui semblait égal. Elle s'assit tranquillement, le plus loin possible du petit qui faisait ses devoirs. Elle se tenait un peu raide sur sa chaise, extrêmement mal à l'aise pour le moment.. Et alors qu'elle ouvrait la bouche pour enfin répondre à la question de Waverly, deux autres gosses apparurent, pleurnichant et plein de morve.
Tuuli ferma sa bouche d'un coup et attendit. Elle haussa les épaules pour signifier à Waverly qu'elle l'excusait. Elle pensa très fort qu'elle ne voulait pas d'enfant avant d'avoir au moins 35 ans. La scène qui se jouait devant elle lui fit faire des grimaces assez étranges. L'agacement et la gêne étaient de retour, tels de compagnons de route inséparables.
Elle attendit patiemment que l'échange soit terminé et que Waverly revienne vers elle :
« Donc, tu m’avais dit… Du thé ? Au fait, comment te portes-tu ? »
Tuuli fit une mine déconfite et fini par répondre :
"En fait j'ai pas eu le temps de parler à cause de tes... - elle fit un geste de la mains vers l'endroit où se trouvait les enfant - En réalité, je préférerais un café si tu as ?"
Elle profita de l'interlude pendant la préparation d sa boisson pour observer l'endroi où elle se trouvait. Elle gigota sur sa chaise.. Décidemment, elle était très mal à l'aise.
Quand Tuuli va prendre un café et faire peur aux gosses • Waverly
Pauvre Tuuli assaillit par cette ribambelle d’enfants qu’elle n’avait jamais demandé à côtoyer ! Heureusement, la dispute fut de courte durée et Waverly put pleinement s’occuper de sa jolie visite. Midas avait bronché, pendant l’échange. Il n’appréciait pas que ses plus jeunes frères dérangent pendant qu’il tentait d’étudier. Étrangement, la discussion qu’entameraient peu à peu les deux femmes n’embêterait pas. Waverly reposa sa boite de thés et sortit plutôt le café et deux tasses.
« Du café, bien sûr, il n’y a pas de problème. Prends-tu du lait et du sucre avec, ou bien noir ? »
Waverly était très soucieuse de la manière dont elle traitait ses invités. Si les enfants prenaient parfois beaucoup –trop- de place, elle ne laissait pas de côté ceux qui venaient poser leur derrière sur sa chaise. Elle prépara tranquillement les deux tasses de café, prenant soin de suivre les indications de Tuuli et ramena le tout à la table. Elle prit même la peine de sortir quelques petits gâteaux, qu’elle posa devant elles.
« Midas, tu peux en prendre, toi aussi, si tu veux. »
Waverly s’installa près de la scientifique et lui sourit.
« Je suis contente que tu ais finalement accepté mon invitation ! Es-tu si prise que ça par tes recherches ? Bientôt tu nous sortiras un remède contre le cancer, si tu maintiens le rythme ! »
Elle prit doucement sa tasse de café et la porta à ses lèvres. Ses yeux papillonnaient de bienveillance. Qui se douterait de tous les malheurs qui s’étaient enchainés dans sa vie, quelques années plus tôt ? Waverly était la première à chanter que le passé était le passé, de toute façon !
Quand Tuuli va prendre un café et faire peur aux gosses • Waverly
Maintenant j'ai grandi.
« Du café, bien sûr, il n’y a pas de problème. Prends-tu du lait et du sucre avec, ou bien noir ? »
Tuuli reporta son attention sur Waverly et lui répondit doucement : "Du lait mais pas de sucre, s'il te plait." Elle triturait de façon nerveuse son pendentif, sans cesser de gigoter comme une gourde sur sa chaise. Tout dans la maison lui donnait de l'urticaire, et elle, elle était raide sur sa chaise, tel un piquet, aussi rigide qu'un fil de fer. Elle lançait des regard déséspérés vers chaque issue possible puis elle se rendit compte à quel point son attitude était ridicule et surtout malpolie. Alors elle se ressaisit un peu et prit même un des gâteaux qu'on lui offrait. Elle souffla, une moue de désapprobation sur le visage. Moue qu'elle semblait afficher en permanence en fait.
« Je suis contente que tu ais finalement accepté mon invitation ! Es-tu si prise que ça par tes recherches ? Bientôt tu nous sortiras un remède contre le cancer, si tu maintiens le rythme ! »
Tuuli faillit s'étouffer avec un bout de gateau. Ridicule, elle se trouvait ridicule. Assez solenellement, elle s'essuya et répondit :
"Je suis très prise, j'ai été promu chef de section il y a peu et je redouble d'efforts... Contrairement à la plupart des mes "collègues". Et je travaille en électro et en bio-mécanique. Je ne risque pas de guérir le cancer mais je peux tout à fait créer un meilleur modèle de fauteuil rou..."
Elle se râcla la gorge, peut-être n'était-ca pas vraiment apprprié de parler de ça maintenant. Mais Tuuli avait du mal avec les convenances et le "savoir-faire". L'expression même "mettre des gants pour parler" était totalement absurde à ses oreilles. Elle paraissait chaque jour un peu plus prétentieuse et arrogante...
"Hrm. Bref. je suis.. Contente de te voir."
Tout en disant celà, elle porta rapidement sa tasse à la bouche. Elle était gênée, gênée, gênée.
Quand Tuuli va prendre un café et faire peur aux gosses • Waverly
Waverly prépara tranquillement le café de la jeune scientifique, tendant haut les bras pour atteindre les appareils et les tasses. Au début, elle avait eu beaucoup de mal à s’habituer, quémandant souvent l’aide de son plus vieux fils, mais, depuis longtemps déjà, elle savait tenir une cuisine comme une vraie superwomandes années cinquante. Le fauteuil en plus. La tutrice n’ignorait pas dans quel état se trouvait Tuuli : Stressée, à se tortiller comme une gamine sur sa chaise, paniquée. Comme si la maison Stedall était le lieu le plus dangereux qui soit ! Elle eut, pour elle-même, un petit sourire, se disant que la jeune femme était ainsi, qu’elle finirait par se détendre. Waverly posa doucement sa tasse devant son amie et alla rejoindre sa place en roulant.
L’ancienne parachutiste fit un geste de main quelconque. Electro, bio, médecine. C’était la même chose. De la science ! « Un fauteuil avec des lance-rockets intégrés, tu veux dire ? » À vivre avec une bande de petits garçons, on en venait à s’imprégner –un peu- de leur délire. Une chaise roulante supersonique, ce n’était tout de même pas mal ! Waverly n’avait jamais considéré ses jambes, son fauteuil, son handicap comme un tabou. Elle pouvait en parler comme on parle du beau temps, ne se sentant pas exclue ou insultée si l’on mentionnait son état.
« Oh ! Cache ton engouement, t’as une mèche de cheveux qui commence à partir de travers ! »
Waverly agita ridiculement les doigts, imitant Tuuli lorsque celle-ci paniquait. Mais quelle maniaque, cette femme-là, franchement ! Dans ses souvenirs, elle était beaucoup plus laxiste, beaucoup plus encline à s’amuser. Heureusement qu’elle était jolie, hein, parce que sinon… Non, en réalité, Tuuli était toujours adorable, malgré le balai dans le cul.
« Alors, tu as quelqu’un dans ta vie, Tuuli ? »
Midas leva les yeux vers sa tutrice, pas trop surprise, suspicieux, puis retourna à ses travaux. Waverly se doutait de la réponse, mais elle aimait bien taquiner la jeune femme.
Quand Tuuli va prendre un café et faire peur aux gosses • Waverly
Mais je crois que je suis encre un peu immature..
Quand Tuuli entendit la propositions du fauteuil avec lance-roquettes, elle s'étrangla légèrement avec son café. Cette idée lui paraissait absurde, sincèrement absurde. Elle haussa les sourcils, véritablement déconcertée par cette idée. Elle ne voyait pas d'interet réel à intégrer un lance-roquette à son fauteuil... même en temps de conflit, ce serait impossible à gérer, la poussée serait trop forte et..
« Oh ! Cache ton engouement, t’as une mèche de cheveux qui commence à partir de travers ! »
Tuuli stoppa net son raisonnement et fit une drôle de tête. Un truc qui ressemblait vaguement à une grimace. Elle finit par passer nerveusement sa main dans ses cheveux, sans vraiment saisir l'ironie ou même le sourire dans cette phrase. Elle agita nerveusement ses doigts et vira rouge pivoine lorsqu'elle se rendit compte que Waverly se moquait gentiment d'elle. Elle remit nerveusement son nez dans sa tasse...
« Alors, tu as quelqu’un dans ta vie, Tuuli ? »
.. Tuuli fut tellement surprise qu'elle cracha le café qu'elle avait dans la bouche, s'éclaboussant tout le visage avec la boisson chaude. Elle devint carmin et s'essuya rapidement avec une serviette. Nerveusement, elle tritura le bas de son t-shirt sous la table.
"En.. en fait, je... je pense que... je crois... que je suis mieux seule."
A vrai dire, elle ne s'était pas posé la question d'avoir un fiancé ou même un simple amant depuis qu'elle avait 19 ans et que Jo était décédé. En fait, elle avait même oublié quelque part, comment tout ça fonctionnait. Le charme, la drague, les relations, l'amour, tout ça c'était ... Pfffrrrt dans sa tête. Elle espérait que cette réponse conviendrait à Wavy, mais au fond, elle souffrait déjà de la suite de cette discussion...
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