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| | Et voilà, il avait fallu que ça lui tombe dessus. Sophie avait tendance à se croire tout permis, et à force, les instructeurs commençaient à perdre patience et se montraient de plus en plus cyniques avec elle. Mais là, cela dépassait de loin ce qu'elle avait pu imaginer. L'un d'eux avait décidé de l'affubler d'un fantastique costume de taupe rose fluorescent pour une journée entière. La honte totale.
Les cheveux emmêlés sous sa capuche en forme de tête de taupe, elle marchait dans les rues d'EP-1 en cherchant le lieu où elle serait susceptible d'être vue par le moins de personnes possible ; elle crevait de chaud là-dessous et ça risquait de gâcher son maquillage. Et puis c'était lourd de porter ce costume. D'ailleurs, dégourdie comme elle était, elle trébucha et se ramassa sur le sol comme une bleue en hurlant.
« UAAARH ! »
Une petite envie de lui marcher dessus ?
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Une journée comme une autre pour Raymond Dupond qui faisait des tours dans la ville en proposant à qui voulait de goûter les délicieuses frites Dupond-deluxe avec extra sauce au poivre. Tout allait apparemment bien jusqu'à ce qu'il entende parler d'une taupe rose par des clients friands de potins. Egalement attiré par toutes les activités comiques de la base, il ne fallut pas quinze minutes au nonagénaire pour se rentre sur les traces de l'animal mystérieux. Un cri bien trop familier l'orienta vers la fameuse taupe qu'il reconnut presque aussitôt. Inquiet mais davantage en colère, il laissa sa baraque à frite sur place afin d'avancer d'un pas décidé mais lent vers Sophie. Une fois à sa hauteur, il la saisit par le bras comme une enfant et la souleva avec une force inattendue.
"Debout ! Qu'est-ce que tu fiches ici à faire tes guignolades ? Tu sèches les cours maintenant ? Après le bikini c'est la taupe, c'est ça ?"
Il fut une époque où il lui aurait mis une fessée mais à cet âge, ce n'était plus de rigueur. D'ailleurs, vous avez remarqué que votre grand père a toujours plus de force que votre père ? Ils cachent bien leur jeu ces vieux...
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| | Après s'être méchamment gamellée sur le bitume, Sophie se sentie soudain soulevée par une force surnaturelle, réalisant qu'il s'agissait en fait du vieux croûton lorsqu'elle entendit le son de sa voix. Et voilà, il allait encore lui faire la morale, lui dire que lui, il a fait la guerre, qu'elle devait honorer la famille, bref, la rengaine habituelle.
« Maiiiiis Papyyy... » lâcha-t-elle dans un gémissement plaintif. C'est qu'il avait encore de la force le vieux croulant. Plus qu'on ne pouvait l'imaginer. « C'est pas moi, j'ai rien fait ! C'est la grosse pute de prof qui m'a forcé à mettre ce truc... » Même avec son grand-père, elle n'avait aucune retenue dans ses mots, et surtout elle n'assumait pas le fait d'avoir été punie. Non, c'était forcément de la faute du prof.
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| | Ainsi donc la vérité éclatait déjà ! Elle n'avait que ce qu'elle méritait, assurément, et voir qu'elle se comportait encore comme une gamine à insulter ses enseignants dans leur dos révoltait l'ancien militaire qu'était Raymond Dupond. Ni une ni deux il secoua la grognasse comme un prunier en la sermonnant bien comme il fallait. Il fallait qu'elle se prépare mentalement à avoir un bleu sur le bras après ça.
"Millediou de millediou ! Si ton professeur te dit de faire quelque chose tu le fais et tu le fais bien ! Et je vais t'apprendre à respecter tes aînés moi ! Il fut un temps où tu t'en serais mangé une bonne, petite peste ! Qu'est-ce que t'as fait encore pour qu'on te fasse mettre ça ? Va pas me dire que c'est sans raison, j'ai fait l'armée, moi, ma petite ! Je sais comment ça marche !"
La prise sur le bras ne se desserrait pas. Ca devait faire mal. Mais le charisme des vieux est un cran au dessus de ce qu'on pourrait imaginer. Surtout un vieux militaire veuf qui tient une baraque à frites...
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| | Il avait une sacrée poigne, le vieux. Grimaçant de douleur, Sophie poussa un grognement en entendant son grand-père lui débiter ses conneries, témoignant clairement d'un agacement certain. Mais elle n'avait pas l'intention de lui rendre des comptes, car elle partait du principe que tout ceci ne le concernait pas. Elle était une grande fille maintenant, et estimait ne pas avoir besoin que papy soit toujours sur son dos à lui faire la morale.
« Je te dis que j'ai rien fait, p'tain. » Elle tira sur son bras pour essayer de le reprendre, mais le vieux ne lâchait pas l'affaire. Alors elle poussa un long soupir et fit la moue, avant de rétorquer : « Et toi, t'es pas censé tenir ta baraque à frites au lieu de traîner sur EP-1 ? Non mais j'vous jure... »
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| | L'arrogance de sa propre petite fille lui faisait honte. Certes elle n'avait pas toujours eu une enfance facile à cause de ses incompétents de parents, mais elle devrait se montrer reconnaissante envers son grand père qui avait pris soin d'elle et qui couvrait à chaque fois ses erreurs en la protégeant. Peut-être l'avait-il trop protégée ? Aurait-elle été moins bête si elle avait eu à assumer pleinement toutes les conséquences de ses actes ? Rien était sûr. En tout cas, il lui apprendrait à répondre à ses aînés !
"Contrairement à toi, si je suis sur EP-1 c'est pour faire mon travail ! Ma baraque est juste là et quand bien même elle y serait pas, je suis majeur et vacciné et si je fais une erreur, je sais en assumer les conséquences ! Maintenant dis moi ce que tu dois faire... Viens boire un coup, tu es rouge comme un enfant qui vient de pleurer."
Il lâcha son bras et retourna lentement vers sa baraque. Il lui servirait un bon jus de fruit comme elle les aimait puis il écouterait ce qu'elle avait à lui dire. Après tout, si elle avait juste à porter ce costume, autant qu'il la raccompagne dès maintenant à la base militaire...
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